Assistance respiratoire non invasive pour les patients atteints de COVID-19 : nouvelles données
Published on 03 Octobre 2022
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La propagation de la COVID-19 exerce une pression sans précédent sur les réseaux de santé du monde entier. Le nombre de patients souffrant d’insuffisance respiratoire due au syndrome de détresse respiratoire aiguë et ayant besoin d’un respirateur a grimpé en flèche. Les pays du monde entier se lancent dans une course contre la montre pour trouver des solutions efficaces et pratiques destinées à soigner les patients à chaque stade de la maladie. Cependant, même si plusieurs traitements s’avèrent efficaces, aucun à ce jour n’a marqué un tournant décisif. À l’heure actuelle, seuls les respirateurs invasifs et non invasifs sont proposés en appui au traitement des cas graves d’insuffisance respiratoire aiguë.
Changements notables dans les procédures de ventilation pour COVID-19
Les patients atteints d’une forme grave de la COVID-19 peuvent développer des symptômes respiratoires qui nécessitent un nombre croissant d’interventions. Au début, celles-ci consistaient à pratiquer une intubation précoce et à fournir une assistance respiratoire invasive, méthode jugée plus efficace qu’une assistance respiratoire non invasive. Cependant, de nouvelles données indiquent qu’une assistance respiratoire non invasive pourrait jouer un rôle plus important et plus bénéfique qu’on ne le croyait de prime abord. D’après Carter et ses collaborateurs, des preuves convaincantes attestent en effet de l’efficacité de cette forme d’assistance respiratoire pour traiter l’insuffisance respiratoire hypercapnique aiguë due à une exacerbation aiguë de la MPOC et pour traiter la détresse respiratoire hypoxémiante aiguë associée à une insuffisance cardiaque congestive chez les patients souffrant d’insuffisance respiratoire aiguë.
Méthodologie de la ventilation non invasive
On désigne par « assistance respiratoire non invasive » la ventilation en pression positive continue (CPAP) et la ventilation spontanée en pression positive bidirectionnelle (BipAP). La CPAP est la méthode de choix, l’utilisation de la BipAP étant réservée aux patients atteints de troubles respiratoires complexes qui contractent la COVID-19. Quant aux canules nasales à haut débit, elles demeurent controversées et suscitent des avis divergents relativement à la façon dont elles peuvent servir à traiter l’insuffisance respiratoire chez les patients atteints de la COVID-19. Quoi qu’il en soit, l’assistance respiratoire non invasive et les canules nasales à haut débit peuvent servir de traitement d’appoint aux premiers stades du SRAS-CoV-2 afin de prévenir l’intubation ou le recours à une assistance respiratoire invasive.
L’assistance respiratoire non invasive est toutefois une intervention médicale susceptible de produire des aérosols. Il convient donc de prendre les précautions nécessaires pour ce type d’intervention (c.-à-d. effectuer la procédure dans une pièce fermée et porter un masque N95 et des lunettes de protection, en plus des précautions d’usage préconisées en cas de contact et de projection de gouttelettes). Une bonne interface adaptée aux systèmes d’assistance respiratoire non invasive minimise la dispersion à grande échelle de l’air expiré et devrait donc être associée à un faible risque de transmission aéroportée par les patients. Fowler et ses collaborateurs ont souligné que, pendant l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) de 2003, le recours à l’assistance respiratoire non invasive n’a pas été associé à un risque accru de transmission du virus au personnel des soins intensifs qui portait un EPI adéquat. Ce n’est pas le cas de l’intubation endotrachéale qui, pour sa part, a été associée à un risque accru d’aérosolisation et d’infection des travailleurs de la santé. Plus récemment, dans le Guangdong, en Chine, aucun travailleur de la santé n’a été infecté en appliquant les méthodes d’assistance respiratoire non invasive conformément aux directives nationales en matière de protection individuelle.
Pourquoi la ventilation non invasive doit être envisagée dans le cadre du traitement
Il arrive que l’on procède à l’intubation précoce d’un patient en détresse respiratoire dont on sait ou on soupçonne qu’il est atteint de la COVID-19, alors qu’il aurait pu bénéficier d’une assistance respiratoire non invasive. Selon l’OMS, il est souhaitable de privilégier l’assistance respiratoire non invasive dans le cas des patients qui nécessitent une intervention minime ou qui sont en phase de sevrage d’une assistance respiratoire invasive. C’est sans compter que l’intubation et l’assistance respiratoire inutiles d’un patient peuvent priver un autre patient d’un traitement salutaire dans un contexte de pénurie des ressources. L’assistance respiratoire non invasive peut s’avérer une solution de rechange viable pour certains patients, mais n’est pas encore utilisée à grande échelle dans le monde. Pourtant, elle est tout à fait réalisable en position allongée, comme le montre une étude de Sartini et ses collaborateurs ; une position qui peut solliciter les régions pulmonaires dorsales et permettre l’évacuation des sécrétions qui obstruent les voies aériennes, ce qui améliore les échanges gazeux et le pronostic en cas de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA).
En conclusion, l’assistance respiratoire non invasive présente des avantages substantiels par rapport à l’assistance respiratoire classique. Il faut toutefois se rappeler que, même entre des mains expérimentées, cette technique n’est pas toujours efficace et dépend de nombreux facteurs, tels que la gravité de l’insuffisance respiratoire aiguë, la formation et l’expérience du personnel médical, ainsi que le lieu où sont prodigués les soins. Comme pour bien d’autres traitements, on peut espérer que les résultats obtenus grâce à cette méthode s’amélioreront avec le temps et l’expérience.
Références :
Certaines références ci-dessous ne sont disponibles qu’en anglais.Arshad Ali S, Baloch M, Ahmed N, Arshad Ali A, Iqbal A. The outbreak of coronavirus disease 2019 (COVID-19)-an emerging global health threat. J Infect Public Health. 2020;13(4):644–6. https://doi.org/10.1016/j.jiph.2020.02.033.
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